Critiquer un arrêt de la Cour de cassation

Dans un commentaire d’arrêt, vos correcteurs ne veulent pas simplement que vous expliquiez le sens de l’arrêt. Ils veulent également que vous le critiquiez. Commenter un arrêt signifie aussi critiquer un arrêt de Cour de cassation ! Mais commenter ou critiquer n’est pas évident !

Beaucoup d’étudiants font 2 erreurs :

Soit ils ne critiquent tout simplement pas l’arrêt.

Soit pour ceux qui le critiquent, ils considèrent que la Cour de cassation a toujours raison.

Or critiquer un arrêt de la Cour de cassation revient à se demander si la solution de la Cour de cassation est la « meilleure », la plus juste vis à vis du droit positif, à la jurisprudence et à la solution de la Cour d’appel.

Ils ont du mal à se forger une opinion et/ou souvent ne savent pas comment l’exprimer : « La Cour de cassation a eu raison… » Ou « La solution de l’arrêt semble sévère… ».

C’est normal que beaucoup d’étudiants aient du mal à critiquer un arrêt de Cour de cassation parce que pour pouvoir critiquer une solution, il faut savoir sur quels critères il faut apprécier une solution. La discussion critique devient simple et apporte une valeur ajoutée à votre devoir lorsque vous aurez une idée des impératifs au regard desquels vous devez apprécier un arrêt à commenter.

Pour critiquer un arrêt de Cour de cassation, il suffit de se poser une seule question :

La décision mérite-t-elle d’être approuvée ou critiquée et pour quelles raisons d’un point de vue :

1)      Logique

Le raisonnement des juges du fonds est-il parfaitement logique ? Ne recèle-t-il pas une contradiction, une déduction fausse ou hasardeuse ?

2)      Juridique

La solution est-elle cohérente avec les grands principes du droit, avec les règles d’origine légale ou jurisprudentielle ?

Sur quel impératif ou principe la décision est-elle fondée ? Ce principe a-t-il une valeur absolue ou doit-il s’équilibrer avec d’autres impératifs, d’autres intérêts ?

La solution contrevient-elle à la sécurité juridique ?

Dans quel sens la décision fait-elle pencher la balance ? Cela vous paraît-il souhaitable ? Vous pouvez donner votre opinion à condition qu’elle soit justifiée.

La solution est-elle juste ?

La solution est-elle utile, pratique, opportune ?

Quels intérêts fait-elle prévaloir ou protège-t-elle ?

Intérêt général ou particulier, matériels ou moraux, appartenant à quelle catégorie de personnes (les victimes, les enfants, les usagers …) ?

Est-celle socialement juste, est-elle économiquement utile de sauvegarder ces intérêts ?

3)      Economique

La solution favorise-t-elle la sécurité des transactions ou leur facilité, leur rapidité ?

La solution favorise-t-elle l’inflation ? Pénalise-t-elle les débiteurs ou les créanciers ?

4)      Social

La solution protège-t-elle les droits de la catégorie économiquement et socialement la plus faible (salariés, locataires, consommateurs …)

5)      Morale

La décision ou ses motifs, ses fondements plus lointains ou encore ses incidences ont-ils des implications morales ?

De cette manière, vous pourrez plus simplement critiquer n’importe quel arrêt et votre critique apportera une réelle valeur ajoutée à votre devoir.

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3 réponses

  1. un arrêt de la cour de cassation rendu en rejet « sans motivation » est-t’il critiquable ?

  2. PLESSIER Arnaud dit :

    Bonjour,
    Les questions à se poser pour commenter un arrêt de la Cour de Cassation, peuvent-elles ou non porter sur les faits qu’elle dit avoir été souverainement appréciés par la cour d’appel, en réalité complètement dénaturés. Il s’agit par exemple de l’occultation du véritable objet d’une lettre comptant six lignes et de l’ajout d’une clause absolument inexistante dans l’interprétation d’un contrat comptant tout au plus vingt lignes ? Quand, douze ans après cet arrêt d’appel, on est tombé sur des preuves formelles qu’un conseiller de ladite cour d’appel (de renvoi) avait des liens professionnels, voire amicaux, avec la partie attaquée gagnante, quel recours aurait-on, et serait-ce répréhensible de le faire savoir ? Merci

  3. Phil dit :

    https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007031559
    Un arrêt qui date mais qui me semble poser problème.

    La solution retenue : « APPEL CIVIL – Appel incident – Appel principal limité à l’un des chefs du jugement – Exécution du jugement antérieurement à l’appel principal – Appel incident sur les autres chefs – Possibilité (non)
    Conformément à l’article 409 du nouveau Code de procédure civile, le demandeur à l’appel incident, retrouve la possibilité de se défendre et n’est plus tenu de se soumettre à la décision querellée, une fois l’appel principal connu de lui »

    Le titrage est faux selon moi, car en l’espèce, l’exécution du jugement était postérieur + que signifie la mention « possibilité (non) » alors que visiblement, la partie a pu faire son appel incident ?
    Pourquoi la Cour introduit la « connaissance de l’appel » alors que l’article 409, sur lequel elle se base, n’en fait aucun état ? Seule la formation régulière de l’appel y est inscrite…

    Tant de questions pour 1 seul arrêt, si qq’un peut m’éclairer, je l’en remercie d’avance.

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